Exposition au Distilbène : le préjudice d’anxiété doit être réparé !

La Cour de cassation vient de rappeler que l'anxiété qui résulte de l'exposition à un risque de dommage constitue un préjudice indemnisable. S’agissant de l'exposition in utero au distilbène, il n'est donc pas besoin de rapporter la preuve d'un lien de causalité certain entre l'exposition au risque et l'hypofertilité pour indemniser le préjudice d'anxiété. Explications.

Une femme avait assigné devant la justice la société pharmaceutique productrice du Distilbène en responsabilité et indemnisation de ses préjudices consécutifs à son exposition in utéro au diéthylstilbestrol (DES), à la suite de la prise de ce médicament, par sa mère, au cours de la grossesse.   

Les juges avaient toutefois rejeté l’ensemble de ses demandes.

Selon eux, la responsabilité du laboratoire ne pouvait être retenue dès lors, d'une part, que la requérante ne présentait aucune des anomalies de l'appareil génital associées à l'exposition au DES et, d'autre part, que la cause de son infertilité n'était pas clairement établie puisqu'elle pouvait tout aussi bien résulter d’une affection à Chlamydia.

De même, aucune réparation, y compris celle d’un préjudice d’anxiété, ne pouvait être allouée, la preuve d’un lien de causalité entre l’exposition de la victime au DES et son hypofertilité n’étant pas rapportée.

Saisie du litige, la Cour de cassation a censuré cette décision. Au visa de l’article 1240 du Code civil, elle rappelle :
- Qu’ouvre droit à réparation le dommage en lien causal avec une faute, même si celle-ci n’en est pas la seule cause ;
- Qu’il découle de ce texte que constitue un préjudice indemnisable l’anxiété résultant de l’exposition à un risque de dommage.

Ainsi, en se déterminant comme ils l’ont fait, par des motifs insuffisants à exclure que l’exposition au DES ait contribué à l’infertilité de la victime et en estimant que le préjudice d’anxiété résultant de l’exposition à un risque de dommage ne doit être réparé, les juges n’ont pas donné de base légale à leur décision. L’affaire devra donc être rejugée.

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 18 octobre 2023, pourvoi n° 22-11.492