La prédisposition pathologique d'une victime, révélée par un accident, ne réduit pas son droit à indemnisation

Un homme, victime d'un accident de la circulation impliquant une voiture, sollicite de l'assureur du conducteur l'indemnisation de son préjudice corporel. À l'appui de sa démarche, il soutient que l'accident a déclenché une pathologie préexistante mais jusqu'alors asymptomatique.

Pour limiter le montant de l'indemnisation accordé au requérant, les juges soulignent que si l’accident a effectivement révélé la maladie, celle-ci était en réalité liée à un état structurel antérieur. Dès lors, les lésions éprouvées par la victime après l'accident ne sauraient être prises en charge par l'assureur du conducteur puisqu'en raison des prédispositions pathologiques de la victime, ces symptômes seraient nécessairement apparus, même si l'accident n'était pas survenu.

Saisie du litige, la Cour de cassation censure cette décision. Elle rappelle que conformément au principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime « le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est résulté n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ».

Ainsi, le droit d’une victime à obtenir l’indemnisation de son dommage corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est issue ne s’est manifestée que par le fait dommageable.

Autrement dit, tant que jusqu’à la survenance du fait dommageable, les prédispositions ne sont que latentes ou que l’état antérieur est asymptomatique et non dommageable, il n’en résulte aucune incidence sur la réparation. Qu’une pathologie antérieure ait été l’une des causes du dommage laisse donc le principe de la réparation intégrale du dommage inchangé à la condition, toutefois, que le fait imputable au défendeur apparaisse lui-même comme une cause certaine de celui-ci.

Dans cette affaire, l’assureur doit donc indemniser les préjudices de la victime dans leur intégralité.

⚖️ Cour de cassation, 2ème chambre civile, 15 février 2024, pourvoi n° 22-20.994

Pas de responsabilité, pas d’action en réparation de l’aggravation d’un préjudice !

Une demande en réparation de l’aggravation d’un préjudice ne peut être accueillie que si la responsabilité de l’auteur présumé du dommage a été reconnue.

Tel est le rappel que vient d’effectuer la Cour de cassation dans sa décision en date du 21 mars 2024.

Dans cette affaire, un homme avait chuté alors qu’il tentait de monter dans un train. Gravement blessé, il avait dû être amputé de sa jambe droite, de son bras droit ainsi que de deux orteils de son pied gauche. Un rapport d’expertise médicale avait fixé la date de consolidation de son état de santé au 31 décembre 1982. 

Près de vingt plus tard, en mai 2001, cet homme avait assigné la SNCF en responsabilité et indemnisation. Par un jugement rendu le 1er octobre 2003 et devenu irrévocable, cette demande avait toutefois été rejetée, jugée comme prescrite.

Invoquant notamment une aggravation de son état de santé survenue en 2008, la victime avait alors de nouveau assigné la SNCF en responsabilité et indemnisation de son entier préjudice en 2010. A l’appui de sa démarche, elle soutenait pour l’essentiel que l’aggravation est un dommage nouveau, automne du préjudice initial, donnant naissance à un droit à réparation distinct.

L’affaire a alors été portée devant la Cour de cassation qui rappelle deux principes :

1️⃣  Le premier suivant lequel lorsqu’une décision judiciaire a été rendue sur une question, cette question ne peut plus être contestée dans le cadre de la même affaire ;

2️⃣ Le second selon lequel une demande de réparation de l’aggravation d’un préjudice ne peut être acceptée que si la responsabilité de l’auteur présumé du dommage a été reconnue.

Rapportés au cas d’espèce, les Hauts magistrats jugent donc qu’en raison de la prescription de l’action en indemnisation menée par la victime en 2001, la responsabilité de la SNCF n’a pas été établie et le préjudice initial n’a pas été déterminé avant l’introduction de l’action en aggravation. Par conséquent, l’action en responsabilité et indemnisation, tant du préjudice initial que du préjudice aggravé, est irrecevable car elle porte atteinte à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du 1er octobre 2003.

⚖️ Cour de cassation, 2ème chambre civile, 21 mars 2024, pourvoi n° 22-18.089

Accidents de la circulation : la loi Badinter ne s’applique pas en cas d’actes intentionnels

Le fait volontaire du conducteur d'un véhicule est exclusif de la qualification d'accident de la circulation, au sens de la loi du 5 juillet 1985. 

Telle est la précision que vient d’apporter la Cour de cassation dans sa décision en date du 15 février 2024.

Dans cette affaire, la passagère d'une voiture, conduite par une amie, avait été blessée lors d'une sortie de route du véhicule. Elle avait alors assigné devant les tribunaux son amie (propriétaire de la voiture) et l’assureur du véhicule pour obtenir, sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 (loi Badinter), l'indemnisation de son dommage corporel.

Mais l'assureur s’était défendu : pour lui, il ne s'agissait pas d'un accident de la circulation dans la mesure où le dommage subi par la victime n'était pas la conséquence d'un événement fortuit, mais le résultat d'un acte volontaire de la conductrice, celle-ci ayant délibérément pris la décision de précipiter son véhicule en dehors de la chaussée. A ce titre, il ne pouvait donc être condamné à prendre en charge le dommage corporel de la victime.

Toute la difficulté de cette affaire reposait donc sur une seule question : le fait que la conductrice ait pris l’initiative de la sortie de route à l’origine du préjudice subi, même sans avoir eu l’intention de le causer, suffisait-il à évincer le caractère accidentel nécessaire à l’application de la loi Badinter ? 

Saisie du litige, la Cour de cassation répond par l’affirmative.

Elle affirme ainsi que ne constitue pas un accident, au sens de la loi du 5 juillet 1985, celui qui, volontairement provoqué par le conducteur ou par un tiers, ne présente pas, de ce fait, un caractère fortuit.

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 15 février 2024, pourvoi n° 21-22.319

Indemnisation du dommage médical : précisions quant au versement de la rente et à l’évaluation du préjudice de perte de gains professionnels futurs

Un jeune homme, âgé de 16 ans, est victime d'un grave accident de la circulation. Après plusieurs interventions chirurgicales, il est pris en charge, dans un premier hôpital relevant de l'assistance publique - hôpitaux de Paris (APHP), où il subit plusieurs interventions de réfection de ses pansements. Du fait de la progression d'une nécrose, il est finalement amputé du tiers inférieur de sa jambe droite.

Souffrant d'une infection polymicrobienne, il est alors par la suite transféré dans un second hôpital, relevant également de l’AP-HP, où il subit encore treize interventions chirurgicales.

Après expertise complémentaire, le tribunal administratif juge que le retard mis, par le service des urgences du premier hôpital, dans le diagnostic et la prise en charge de l'ischémie sévère du membre inférieur droit, a fait perdre au patient 70% de chances d'éviter l'amputation de sa jambe. En conséquence, l’AP-HP est condamnée.

Estimant que la somme qui lui est allouée en réparation de son préjudice est insuffisante, le jeune homme conteste la décision rendue sur ce point. Il finira par avoir gain de cause.

Saisi du litige, le Conseil d’État juge en effet :

1️⃣ Sur les frais d'appareillage futurs et les frais de santé futur

S’agissant des dépenses de santé futures, l'indemnisation n'est pas subordonnée à la présentation de justificatifs d'engagement de ces frais, mais à la preuve de la persistance du besoin à l'origine de ces dépenses. Dès lors, s'il est loisible au juge, lorsqu'il décide d'accorder une rente pour l'indemnisation d’un besoin futur conduisant la victime à exposer des dépenses de santé, de demander à celle-ci de produire, à intervalles réguliers, des éléments de nature à justifier de la persistance de ce besoin, le versement de la rente à la victime ne peut être subordonné à la production de justificatifs d'engagement de dépenses. 

2️⃣ Sur la perte de gains professionnels futurs

Dans le cadre d’une demande au titre de la perte de gains professionnels futurs, la victime, dont les dommages subis affectent un accès dans les conditions usuelles au monde du travail, peut prétendre à la réparation de la perte de revenus professionnels, même si elle n'est pas dans l'incapacité d'occuper un emploi.

Conseil d’État, 5ème et 6ème chambres réunies, 13 février 2024, affaire n° 463770

La loi Badinter s’applique aux tramways qui circulent sur des voies qui ne leur sont pas propres

À cause d'une bousculade entre élèves à la sortie des classes, un collégien perd l'équilibre et fait un écart sur la voie de tramway qui longe le trottoir sur lequel il marche. Heurtant le tram qui arrive, il se blesse à la tête et au pied droit.

 Ses parents, agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de la victime, assignent alors devant les tribunaux la société exploitant le tramway ainsi que son assureur en indemnisation de leurs préjudices.

 Les juges accueillent leur demande et condamnent in solidum la société exploitant le tramway et son assureur à payer à la victime la somme de 240 618, 75 € à titre de réparation de son préjudice corporel et aux parents la somme de 5 000 € au titre de leur préjudice d'affection.

 La société exploitant le tramway conteste cette décision. A l'appui de sa démarche, elle soutient que la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation (dite loi Badinter) ne saurait s'appliquer en l’espèce. En vain.

 Saisie du litige, la Cour de cassation rejette l’argument. Si, en effet, l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation prévue par la loi Badinter est applicable aux victimes d'accidents dans lesquels est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou se semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres, force est de constater en l’espèce, qu’à l’endroit où s’est produit le choc, la voie de tramway ne lui était pas propre en ce qu'elle n'était pas isolée du trottoir qu'elle longeait.

 Cour de cassation, 2ème chambre civile, 21 décembre 2023, pourvoi n° 21-25.352

Chute d’un piéton dans un parking : en l’absence de contrat, la responsabilité délictuelle peut être engagée !

Dans un arrêt du 21 décembre 2023, la Cour de cassation a jugé que la responsabilité de l'exploitant d'un parking peut être engagée, a l'égard de la victime d'une chute survenue dans ce parking, sur le fondement de la responsabilité contractuelle si la victime a contracté avec cet exploitant et sur celui de la responsabilité extra-contractuelle si la victime est tiers au contrat de stationnement. Explications.

Dans cette affaire, une femme avait chuté alors qu'elle marchait dans un parc de stationnement souterrain. Blessée, elle a assigné, devant les tribunaux, en responsabilité et indemnisation de son préjudice, la société exploitant le parking et son assureur.

Mais pour les juges, cette demande, fondée sur la responsabilité délictuelle, ne peut aboutir car une société qui met à disposition un espace de stationnement, et par conséquent organise et réserve des voies de circulation pour les piétons, qu’ils soient conducteurs ou non, conclut avec eux un contrat qui la rend débitrice d'une obligation de sécurité excluant l'application du régime de responsabilité délictuelle.

Mécontente, la victime conteste, arguant qu’il n’y a de contrat qu'entre le conducteur du véhicule qui le gare dans un parc de stationnement (pour autant qu'il prenne un ticket) et l'exploitant de ce parc de stationnement, et non entre ce dernier et le passager du véhicule.

Saisie du litige, la Cour de cassation valide ce raisonnement, considérant que la preuve d’un contrat entre l’exploitant du parking et la victime n’est pas démontrée. Elle juge donc pour la première fois que la responsabilité de l'exploitant d'un parking peut être engagée, à l'égard de la victime d'une chute survenue dans ce parking, sur le fondement de la responsabilité contractuelle si la victime a contracté avec cette exploitant et sur celui de la responsabilité délictuelle si la victime est tiers au contrat du stationnement.

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 21 décembre 2023, pourvoi n° 21-22.239

Accidents de la circulation : articulation entre la loi du 5 juillet 1985 et le droit commun de la responsabilité civile

Les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 n’excluent pas l’application de la responsabilité civile extracontractuelle de droit commun à l’encontre de toute personne autre que les conducteurs et gardiens des véhicules terrestres à moteur impliqués dans l’accident.

Telle est la précision que vient d’apporter la Cour de cassation.

Dans cette affaire, un cycliste qui circulait à vélo avait été renversé par un autre cycliste qui se trouvait derrière lui, alors qu'un camion non identifié venait de les dépasser.

Souhaitant être indemnisé de ses préjudices, le cycliste blessé a par la suite assigné le second cycliste (et son assureur) devant les tribunaux, sur le fondement de la responsabilité civile extracontractuelle de droit commun.

Une question se posait alors : le cycliste renversé pouvait-il agir contre l’autre cycliste sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile ?

« Non », répondent les juges : dès lors qu’un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans l’accident, seule une action sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 (dite loi Badinter) est possible à l’encontre du conducteur et, à défaut d’être identifié, contre le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO).

Saisie du litige, la Cour de cassation censure ce raisonnement. Au visa de l’article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des articles 1382 et 1384, alinéa 1er, devenus 1240 et 1242, alinéa 1er du Code civil, elle juge que, si les dispositions de la loi de 1985 « sont d’ordre public, elles n’excluent pas l’application de celles relatives à la responsabilité civile extracontractuelle de droit commun à l’encontre de toute personne autre que les conducteurs ou gardiens des véhicules terrestres à moteur impliqués dans l’accident ».

Ainsi, il convient de distinguer deux situations : en présence d’un accident impliquant un véhicule terrestre à moteur et une autre personne, la responsabilité de cette dernière peut être mise en œuvre sur le fondement du droit commun, alors que la responsabilité du conducteur d’un véhicule terrestre à moteur ne pourra exclusivement être engagée que sur le fondement de la loi de 1985.

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 30 novembre 2023, pourvoi n° 22-18.525

Erreur médicale : indemnisation possible d’un préjudice moral non compris dans les souffrances endurées et le déficit fonctionnel permanent

Par une décision en date du 6 décembre 2023, la Cour de cassation juge qu’il est possible d'indemniser indépendamment un préjudice moral dès lors que les sommes allouées au titre du déficit fonctionnel permanent et des souffrances endurées n'incluent pas ce préjudice. Explications.   

Victime d’une subluxation rotulienne, un homme est opéré sous arthroscopie réalisée par un chirurgien orthopédiste. Au cours de l’opération, le chirurgien décide de procéder à l’ablation de la bourse pré-rotulienne du patient. Puis, à la suite de la survenue d'un hématome postopératoire, une nouvelle intervention chirurgicale est pratiquée. 

Dix ans plus tard, le patient, souffrant de douleurs articulaires persistantes, assigne devant la justice le chirurgien, en responsabilité et indemnisation.

Après avoir constaté que l'ablation de la bourse pré-rotulienne, organe sain, avait été inutile, les juges concluent à une faute du chirurgien et, à ce titre, allouent au patient 1 000 € en réparation du préjudice moral subi.

Aux côtés de son assureur, le chirurgien se défend, rappelant « que le préjudice moral lié aux souffrances psychiques et aux troubles qui y sont associés est inclus dans le poste de préjudice temporaire des souffrances endurées ou dans le poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent, de sorte qu’il il ne peut être indemnisé séparément au titre d'un préjudice distinct ». En vain.

Saisie du litige, la Cour de cassation confirme la décision des juges. Elle valide ainsi la possibilité d'indemniser indépendamment un préjudice moral dès lors que les sommes allouées au titre du déficit fonctionnel permanent et des souffrances endurées n'incluent pas ce préjudice dont, par ailleurs, il a été constaté l'existence.

Cour de cassation 1èrechambre civile, 6 décembre 2023, pourvoi n° 22-20.786

Accident complexe impliquant une remorque : quid de la contribution à la dette ?

En cas d’accident complexe impliquant un ensemble routier formé par un véhicule auquel est attelée une remorque, le Code des assurances offre aux victimes la possibilité d’exercer leur action en indemnisation soit à l’encontre de l’assureur du véhicule, soit à l’encontre de l’assureur de la remorque. En revanche, la solution diffère quant à la contribution finale de la dette.

Tel est le rappel que vient d’effectuer la Cour de cassation.

Dans cette affaire, un ensemble routier, composé d’un tracteur et d’une remorque, avait percuté un véhicule léger, avant de franchir le terre-plein central, de se renverser et de percuter un second ensemble routier, également composé d’un tracteur et d’une remorque. Des débris de la collision avaient alors heurtés deux autres véhicules légers. Le conducteur du premier ensemble routier ainsi qu’une passagère se trouvant dans l’un des véhicules heurtés par les débris sont décédés. Les autres personnes impliquées ont été blessées.

Après avoir indemnisé les victimes, l’assureur du premier ensemble routier a assigné en justice les assureurs des autres véhicules. Il sollicitait leur condamnation à lui rembourser 1/7ème des indemnités versées, considérant que 7 véhicules étaient impliqués dans l’accident. En vain.

Saisie du litige, la Cour de cassation confirme la décision des juges qui ont considéré que les ensembles routiers, composés d’un tracteur et d’une remorque, forment chacun, au stade de la contribution à la dette, un seul et unique véhicule. En l’espèce, la charge de la dette d’indemnité doit donc se répartir non pas par septième mais par cinquième.

Pour les Hauts magistrats, l’article R. 211-4-1 du Code des assurances distingue en effet, au stade de l’obligation à la dette, le véhicule et la remorque qui lui est attelée, dans l’unique but d’offrir une option à la victime dans l’exercice de l’action directe et de faciliter l’indemnisation. Mais, une fois ce but atteint, le véhicule et la remorque redeviennent un seul et même véhicule  

Cour de cassation, 2ème chambre civile, 12 octobre 2023, pourvoi n° 21-19.580

Assurance et responsabilité : un vélo électrique n’est pas un véhicule à moteur selon l’UE

La Cour de justice de l’Union européenne vient de juger qu’un vélo à assistance électrique ne relève pas de l’obligation d’assurance des véhicules à moteur puisqu'il n’est pas actionné exclusivement par une force mécanique. Explications.

Dans cette affaire, le conducteur d’un vélo à assistance électrique (VAE), grièvement blessé après avoir été happé par une voiture sur la voie publique en Belgique, est décédé quelques semaines plus tard.

Lors de la procédure judiciaire ultérieure visant à établir un éventuel droit à indemnisation, un différend est survenu concernant la qualification juridique du VAE : doit-il être considéré comme un « véhicule » ?

 Saisie du litige, la Cour de Justice de l’Union Européenne est venue répondre par la négative, faisant remarquer que les dommages susceptibles d’être causés par des engins qui ne sont pas actionnés exclusivement par une force mécanique, tels que le vélo à assistance électrique, sont bien moindre en termes de quantité et de gravité que ceux que peuvent causer les véhicules actionnés exclusivement par une force mécanique, ces derniers pouvant atteindre une vitesse sensiblement plus élevée.

A ce titre, elle juge, au visa de la directive 2009/103/CE, qu’un vélo à assistance électrique n’est donc pas soumis à l’obligation d’assurance automobile par le droit de l’Union dès lors qu’il n’est pas actionné exclusivement par une force mécanique.

Dans l’accident mortel examiné, la qualification juridique du vélo en cause était cruciale, les victimes non conductrices étant soumises (en Belgique comme en France) à des règles plus protectrices que les victimes conductrices d’un véhicule à moteur.

Cour de justice de l’Union Européenne, 12 octobre 2023, affaire n° C-286/22

Préjudice économique du conjoint survivant et des enfants : précision sur la méthode d’évaluation

Le préjudice du conjoint survivant lié à la perte de revenus consécutive au décès de son épouse doit être calculé déduction faite du préjudice économique des enfants, sans tenir compte, dans le cadre de cette déduction, des sommes que ces derniers ont reçues de la part d'un tiers payeur. Telle est la précision que vient d'apporter la Cour de cassation.

Dans cette affaire, une mère de famille était décédée à l'hôpital le lendemain de son accouchement. Les médecins en charge de l'accouchement et le centre hospitalier avaient alors été reconnus coupables d'homicide involontaire, raison pour laquelle le mari de la victime avait saisi, en son nom personnel et en qualité de représentant légal de ses deux filles mineures, une commission d'indemnisation des victimes d'infractions pour obtenir réparation du préjudice subi.

Pour évaluer le préjudice économique de l’époux, les juges, appelés à trancher le litige, s’étaient attachés à déterminer les revenus globaux du foyer antérieurement au décès, auxquels ils avaient déduit la portion des revenus provenant du mari et la fraction des revenus de son épouse qu’elle consommait pour elle-même (autrement dit, la part d’autoconsommation de la victime). Le montant des dommages et intérêts versés au titre de la perte de revenus au conjoint survivant correspondait donc, selon la modalité de calcul retenue, à la perte de revenus globale, déduction faite de la part d’autoconsommation du conjoint prédécédé, capitalisée à titre viager, somme à laquelle il fallait encore retrancher le préjudice économique des enfants, après déduction du capital décès perçu par chacune d’entre elles.

Or, le FGTI contestait ce dernier point. Pour lui, la déduction du montant du préjudice économique des enfants devait s'opérer avant (et non après) imputation des éventuelles sommes à payer par les tiers payeurs.

Saisie du litige, la Cour de cassation retient cette analyse. Elle censure ainsi la décision des juges au visa du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, après avoir relevé que la méthode d'évaluation du préjudice économique du conjoint survivant, retenue par les juges, imposait de déduire de la perte de revenus globale du foyer, capitalisée de façon viagère, les pertes financières subies par les deux enfants telles qu'elles avaient été préalablement évaluées avant imputation des capitaux décès leur revenant.

Exposition au Distilbène : le préjudice d’anxiété doit être réparé !

La Cour de cassation vient de rappeler que l'anxiété qui résulte de l'exposition à un risque de dommage constitue un préjudice indemnisable. S’agissant de l'exposition in utero au distilbène, il n'est donc pas besoin de rapporter la preuve d'un lien de causalité certain entre l'exposition au risque et l'hypofertilité pour indemniser le préjudice d'anxiété. Explications.

Une femme avait assigné devant la justice la société pharmaceutique productrice du Distilbène en responsabilité et indemnisation de ses préjudices consécutifs à son exposition in utéro au diéthylstilbestrol (DES), à la suite de la prise de ce médicament, par sa mère, au cours de la grossesse.   

Les juges avaient toutefois rejeté l’ensemble de ses demandes.

Selon eux, la responsabilité du laboratoire ne pouvait être retenue dès lors, d'une part, que la requérante ne présentait aucune des anomalies de l'appareil génital associées à l'exposition au DES et, d'autre part, que la cause de son infertilité n'était pas clairement établie puisqu'elle pouvait tout aussi bien résulter d’une affection à Chlamydia.

De même, aucune réparation, y compris celle d’un préjudice d’anxiété, ne pouvait être allouée, la preuve d’un lien de causalité entre l’exposition de la victime au DES et son hypofertilité n’étant pas rapportée.

Saisie du litige, la Cour de cassation a censuré cette décision. Au visa de l’article 1240 du Code civil, elle rappelle :
- Qu’ouvre droit à réparation le dommage en lien causal avec une faute, même si celle-ci n’en est pas la seule cause ;
- Qu’il découle de ce texte que constitue un préjudice indemnisable l’anxiété résultant de l’exposition à un risque de dommage.

Ainsi, en se déterminant comme ils l’ont fait, par des motifs insuffisants à exclure que l’exposition au DES ait contribué à l’infertilité de la victime et en estimant que le préjudice d’anxiété résultant de l’exposition à un risque de dommage ne doit être réparé, les juges n’ont pas donné de base légale à leur décision. L’affaire devra donc être rejugée.

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 18 octobre 2023, pourvoi n° 22-11.492

Expertise médico-médicale : les erreurs à ne pas commettre

Vous êtes convoqué.e à une expertise médico-légale ? Ce rendez-vous n’est pas une simple consultation. Il s’agit d’un moment clé au cours duquel vont être déterminés et évalués vos préjudices, ce qui conditionnera le montant de votre indemnisation. Il est donc important de préparer, en amont et avec minutie, cette étape cruciale. Pour vous aider, voici les 5 principales erreurs à ne pas commettre.

1ère erreur : Accepter une provision insuffisante
Les victimes dommages corporels se voient souvent offrir une première provision par la compagnie d’assurances indemnisatrice. Cette démarche, qui tend à instaurer une relation de confiance, ne doit pas pour autant vous inciter à vous laisser porter aveuglément par le dossier. N’oubliez jamais que les assurances cherchent à minorer vos droits pour réduire leurs coûts. Aussi, restez vigilant et protégez vos intérêts.

2ème erreur : Arriver avec un dossier incomplet
Il est essentiel de se présenter à l’expertise médicale avec un dossier complet afin de faire reconnaitrel’intégralité de votre préjudice (physique, matériel, moral, financier). Pour ce faire, munissez-vous de toutes les pièces et justificatifs nécessaires (certificats médicaux, ordonnances, comptes rendus opératoires, radios, scanners, arrêts de travail mais aussi photographies, attestations, factures des frais restés à charge, etc.) et pensez à bien lister l’ensemble de vos dommages.

3ème erreur : Se rendre seul.e à l’expertise
Lors de l’expertise-médico légale, les médecins des compagnies d’assurances discutent et tentent de minimiser l'évaluation du dommage corporel de la victime. C’est pourquoi il est toujours recommandé de se faire assister, au minimum, d’un médecin-conseil qui se chargera, le cas échant avec votre avocat, de défendre vos intérêts. La meilleure solution pour que l’ensemble de vos préjudicies (qu’ils soient économiques ou non, temporaires ou permanents, visibles ou invisibles, directs ou indirects) soient pris en considération et évalués à leur juste valeur.

4ème erreur : Croire que la compagnie défend vos intérêts
On ne le répètera jamais assez : l’indemnisation perçue par les victimes de dommages corporels dépend du contenu de l’expertise médicale. Si les postes de préjudice ne sont pas intégralement analysés et évalués dans l'expertise, le préjudice est sous-évalué et sera donc sous-indemnisé.

5ème erreur : Signer un protocole transactionnel sans en percevoir les enjeux
Une fois le rapport d’expertise rendu, n’hésitez pas à négocier avec l’assureur le montant de votre indemnisation poste par poste, si l’offre qui vous est faite est sous-évaluée, notamment au regard la nomenclature dite Dintilhac. A défaut d’accord acceptable, vous disposez de différents recours pour faire valoir vos droits.

Le Cabinet reste à votre entière disposition pour vous renseigner plus avant. Nous pouvons également vous épauler tout au long de votre processus indemnitaire afin d’obtenir l’indemnisation et la réparation la plus juste et adaptée de votre préjudice.

Pathologies évolutives et délai de prescription : la Cour de cassation se prononce

Dans le cas d’une pathologie évolutive causant un dommage corporel, le délai de prescription de l’action en responsabilité du fait des produits défectueux ne peut commencer à courir en l’absence de consolidation du dommage. Explications.

Une femme, souffrant d’une myofasciite à macrophages qu’elle imputait à un vaccin reçu 17 ans plus tôt, assigne devant la justice le laboratoire auteur du vaccin, en responsabilité et indemnisation.

Se pose alors le problème de la prescription de cette action.

Rappelons que l’action fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux est soumise à un double délai : un délai de prescription de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir, connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur ; un délai de forclusion de dix ans qui empêche toute action contre le producteur dix ans après la mise en circulation du produit, sauf à démontrer l’existence d’une faute.

Saisie du litige, la Cour de cassation précise alors qu’en matière de dommage corporel, le point de départ du délai triennal doit s’entendre comme la date de consolidation. Elle en déduit donc qu’en présence d’une pathologie évolutive rendant impossible la fixation de la consolidation, le délai ne peut commencer à courir.

Par cette décision, la Cour de cassation consacre la spécificité des pathologies évolutives. A ne pas en douter, elle renforce ainsi la protection des victimes concernées en retenant l’impossibilité de fixer une date de consolidation et donc le point de départ du délai de prescription. 

L’indemnisation par l’ONIAM des séquelles d’un accouchement par voie basse

Le cabinet a obtenu, après plusieurs années de procédure, une belle victoire tant sur un plan juridique que sur un plan humain.

La naissance d'un enfant est habituellement un événement rempli de joie pour les parents mais aussi pour le médecin. Qu’y a –t-il de plus beau que d’aider une femme à donner la vie ? Toutefois, l’accouchement peut parfois être source de complications, il est dit « dystocique ».

Par un important arrêt du 19 juin 2019, publié au bulletin, la Cour de cassation s’est prononcée sur les conditions d’indemnisation par l’ONIAM des séquelles survenues à la suite d’un tel accouchement. (Civ. 1ère, 19 juin 2019, n° 18-20.883)

En l’espèce, le gynécologue, au cours d’un accouchement,  confronté à une dystocie des épaules de l’enfant à naître, a effectué des manœuvres obstétricales. L’enfant a présenté à la naissance une paralysie du plexus brachial.

La littérature scientifique dénombre six facteurs prédictifs de dystocie des épaules : la macrosomie, le diabète, un antécédent de dystocie des épaules, l’obésité maternelle, la parité élevée et le dépassement du terme. Même si les facteurs de risque de dystocie ont une faible valeur prédictive, ils doivent être recherchés et le médecin commet une faute dans le suivi de la grossesse s’il n’a pas précisément  déployé tous les moyens d’investigation.

La mère a alors assigné, tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentante légale de son fils mineur, le gynécologue obstétricien et l’ONIAM.

Le collège d’experts  judiciaire désigné a conclu à l’absence de faute du médecin tant dans le suivi de la grossesse que dans le déroulement de l’accouchement.

Le problème se posait donc de savoir si la paralysie du plexus brachial était un accident médical non fautif indemnisable, au sens des dispositions de l’article L.1142-1 II du code de la santé publique,  au titre de la solidarité nationale.

Si les deux premières conditions requises tenant à l’absence de faute et au seuil de gravité des dommages, ne faisaient guère de difficulté, les deux autres conditions tenant à la preuve que l’accident médical soit imputable à un acte de soin et qu’il ait eu pour le patient des conséquences anormales, ont suscité de vifs débats.

L’accouchement est-il acte de soin ?  

Fidèle à sa position « naturaliste », l’ONIAM s’est efforcé de convaincre les juges que l’accouchement ne devait pas être assimilé à un acte de soin, notion qui suppose une pathologie préexistante.

Pour notre part, nous considérons que dès lors qu’une difficulté empêche une expulsion naturelle et impose  l’intervention du médecin dans un rôle actif, et non pas seulement de surveillance ou d’accompagnement, l’accouchement devient assurément un acte de soin.  A ce titre, l’usage d’un instrument tels que forceps ou spatules, ou encore la réalisation d’une césarienne retirent à l’accouchement son caractère strictement naturel pour le faire rentrer dans le champ des actes de soin. De la même manière, l’accouchement accompagné de manœuvres obstétricales doit être regardé comme un acte de soin.

Les juges du fond et la Cour de cassation ne sont pas ralliés à la position de l’ONIAM et  ont, à juste titre, jugé que si l’accouchement par voie basse ne constitue pas en soi un acte médical, les manœuvres obstétricales réalisées doivent  nécessairement être regardées comme telles.

La paralysie du plexius brachial que présentait l’enfant était-elle alors une conséquence anormale d’un accouchement dystocique ?  

Force est de constater que c’est sur ce critère de l’anormalité que se forge l’essentiel du contentieux entre les victimes et l’ONIAM. Comment apprécier l’anormalité ?

Pour y répondre, la jurisprudence invite à raisonner en deux étapes. Il convient d’abord  d’apprécier l’anormalité des conséquences au regard de l’état initial. Si les conséquences de l’acte médical ne peuvent être considérées comme anormales, il convient ensuite de vérifier si la survenance du dommage présentait une probabilité faible.

En l’espèce, l’ONIAM, suivi par les juges, a considéré que la paralysie du plexus brachial présentée par l’enfant dans les suites de l’accouchement ne constituait pas une conséquence notablement plus grave que les conséquences auxquelles il aurait été exposé en l’absence de manœuvres obstétricales. Selon lui, la dystocie des épaules en l’absence de manœuvres obstétricales conduit à la survenue de troubles anoxi-ischémiques ou au décès. L’enfant présentant une paralysie du plexus brachial, il ne ferait aucun doute que les conséquences de l’acte médical ne sont pas plus graves que l’évolution prévisible de l’état de santé de ce dernier en l’absence desdites manœuvres.

La paralysie du plexus brachial n’ayant pas été jugée comme une conséquence notablement plus grave que celles auxquelles aurait été exposé l’enfant en l’absence de manœuvres obstétricales, la question se posait donc de savoir si la paralysie du plexus brachial est un risque de faible probabilité. 

L’approche probabiliste permet de caractériser l’anormalité si le risque de survenue de complication est faible. Toute la difficulté consiste à définir ce qu’on entend par faible probabilité ? L’idée se serait imposée qu’un risque ne peut être considéré comme anormal si son taux de prévalence est supérieur à 5 %.

Les études relèvent  10 à 16 %  de paralysie du plexus brachial, dont 80 % régressent complètement dans un délai qui peut aller de quelques semaines à 18 mois. En conséquence, le risque de présenter une paralysie de plexus brachial persistante est de l’ordre de 2 %. Ce taux ne peut être considéré comme élevé de sorte que le dommage présenté par l’enfant doit être considéré comme anormal.

C’est à cette à conclusion qu’est parvenue la Cour de cassation : «  Après avoir énoncé que le risque issu de la réalisation des manœuvres obstétricales, constitué par la paralysie du plexus brachial, est notablement moins grave que le décès possible de l'enfant, l'arrêt retient que, si l'élongation du plexus brachial est une complication fréquente de la dystocie des épaules, les séquelles permanentes de paralysie sont beaucoup plus rares, entre 1 % et 2,5 % de ces cas, de sorte que la survenance du dommage présentait une faible probabilité ; que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a exactement déduit, sans se contredire, que l'anormalité du dommage était caractérisée ».

Par suite l’ONIAM est tenu d’indemniser au titre de la solidarité nationale. 

 

La régression du droit des victimes d'attentat

La loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice crée le JIVAT : Juge de l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme.

La formation civile du tribunal de grande instance de Paris aura compétence exclusive pour connaitre de l’ensemble des litiges liés à la réparation des préjudices des victimes d’actes de terrorisme.

Les victimes des attentats de Nice seront donc par l’effet de cette loi contraintes de porter leur affaire devant le JIVAT de Paris sil elles entendent contester la position du fonds de garantie.

Sous couvert d’une simplification du parcours procédural, cette réforme prive les victimes d’attentat d’un juge de proximité.

Par ailleurs, une barémisation officieuse de l’indemnisation  est à redoutée

C’est une régression manifeste des droits des victimes.

 

L'impossibilité psychologique de pratiquer une activité de loisirs constitue un préjudice d'agrément

« Mais attendu qu'ayant souverainement constaté que même si l'expert judiciaire avait relevé qu'il n'existait pas d'inaptitude fonctionnelle à la pratique des activités de loisirs auxquelles Mme Y... se livrait avant l'accident, cette dernière n'avait cependant pas repris celle de la moto compte tenu de son état psychologique à la suite de l'accident, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement cette activité sportive ou de loisirs, a décidé à bon droit de l'indemniser de ce préjudice »

Civ. 2e, 5 juillet 2018, n° 16-21.776, Publié au Bulletin

L’indemnisation de la mort

Suite au décès d’un membre de sa famille, quel que soit le prix versé, celui-ci ne saurait compenser la douleur des proches.

La vie n’a pas de prix. Le chagrin n’a pas de prix.

Pour autant, les victimes proches ont des droits à faire valoir à l’encontre du responsable.

Sont indemnisables, les préjudices suivants :
-         Frais d’obsèques
-         Perte de revenus liée à l’interruption de travail afin d’accompagner la victime directe dans les derniers jours précédents son décès
-         Perte de revenus des proches du défunt : le décès de la victime directe va engendrer des pertes ou des diminutions de revenus pour le conjoint ou le concubin, mais aussi pour les enfants à charge.
-         Préjudice moral venant réparer la douleur que provoque chez les proches de la victime la perte de celui-ci.

De nouveaux préjudices personnels à la victime décédée ont été reconnus par la jurisprudence :

-         La perte de chance de survie correspondant à la perte de chance de voir sa vie prolongée conformément à l’espérance de vie d’une personne de son âge

 La première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 13 mars 2007 a ainsi reconnu qu'une jeune victime décédée à la suite d'une erreur médicale devait être indemnisée au titre de « la perte de chance de n'avoir pas vécu plus longtemps » (Civ. 1ère 13 mars 2007, n° 05619020).

-         Les souffrances morales liées à la conscience de mort imminente.

Dans un arrêt du 23 octobre 2012, la chambre criminelle de la Cour de cassation a approuvé la décision rendue par la Cour d'appel de Nouméa allouant aux parties civiles, au titre de leur action successorale, outre une indemnité à raison des souffrances physiques et morales que la victime décédée avait subies du fait de ses blessures entre le moment de l'accident et son décès, une indemnité réparant la souffrance psychique résultant d'un état de conscience suffisant pour envisager sa propre fin (Crim.23 oct.2012, n° 11683.770).

Cette position a été confirmée par la Cour de cassation le 15 octobre 2013, laquelle a considéré que les souffrances endurées du fait des blessures et l’angoisse d’une mort imminente sont des préjudices distincts devant être réparés comme tels (Crim.15 oct.2013, n°12683055).

Il nous appartient, en tant qu’avocats, d’identifier l’ensemble des préjudices et de s’en emparer pour relayer la peine des victimes.

Victimes d’attentat

.L’indemnisation des victimes d’acte de terrorisme est régie par la loi du 9 septembre 1986 en son article 9, laquelle prévoit l’indemnisation par un fonds de garantie spécifique, le Fonds de garantie des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI).

Dès la survenance de l’événement, le Procureur de la république informe sans délai le FGTI de l’identité des victimes qui se charge alors de les  contacter.

La victime ou ses ayants droits peut aussi prendre l’initiative de contacter  le FGTI.

Si la victime est décédée, ses proches sont indemnisés en réparation des préjudices moraux et économiques. Les héritiers peuvent déposer une demande jusqu’à 10 ans après la date du décès.

Si la victime  est blessée, elle peut déposer sa demande jusqu’à 10ans après la date de consolidation.

Dans les deux cas,  il convient de remplir un formulaire de demande d’indemnisation. La demande doit être chiffrée et accompagnée de tous les justificatifs (certificats médicaux, factures, état civil…)

http://www.fondsdegarantie.fr/images/stories/pdf/actes-terrorisme/formulaire-victime-fgti-en-francais-14-0.pdf

Au plus tard 1 mois après avoir reçu la demande, le FGTI doit verser une provision à la victime. Puis dans un délai de 3 mois après avoir reçu la demande, le FGTI établit par écrit une offre d’indemnisation que la victime peut accepter ou refuser.

En cas de refus, la victime devra saisir la juridiction civile pour obtenir réparation.

L’indemnisation versée par le FGTI est cumulable avec celle d’une assurance individuelle ou d’une assurance-vie.

En plus d’une indemnisation intégrale, les victimes bénéficient d’une prise en charge à 100% de la sécurité sociale pour les soins médicaux. Par ailleurs, les victimes âgées de moins de 21ans ainsi que les enfants des personnes décédés peuvent être adoptées en qualité de pupille de la Nation. La mention « Victime du Terrorisme » sur l’acte de décès peut être demandée. Enfin, Il existe une exonération des droits de succession.

Indemnisation du préjudice professionnel d'un proche en plus de la tierce personne

Civ. 2ème 14 avril 2016

" Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si Mme X... avait été obligée d'abandonner son emploi pour s'occuper de son fils et si, de ce fait, elle avait subi un préjudice économique personnel en lien direct avec l'accident consistant en une perte de gains professionnels et de droits à la retraite qui ne serait pas susceptible d'être compensée par sa rémunération te...lle que permise par l'indemnité allouée à la victime directe au titre de son besoin d'assistance par une tierce personne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ".

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do…